ENSEIGNER / APPRENDRE : 2 logiques....

d'après Michel TOZZI

Cahiers pédagogiques n°304-305

LOGIQUE D'ENSEIGNEMENT

Enseigner, c'est :

- préparer un cours, c'est-à-dire, sélectionner, hiérarchiser et mettre en ordre du contenu, avec la satisfaction intellectuelle d'une œuvre d'analyse, de synthèse et d'engagement personnel. ( la « belle fiche de prép ‘» )

- faire le cours prévu, c'est-à-dire la leçon, exposer clairement et logiquement des idées, s'assurer de leur compréhension par un jeu de questions-réponses. (la séquence de classe)

- donner des exercices, des devoirs, des conseils, corriger des erreurs, proposer des modèles. (l'évaluation)

 

LES PRESUPPOSES

- l'enseignant doit traiter le programme et préparer à un examen ou au passage à la classe supérieure.

- il est compétent dans le domaine considéré (il connaît sa matière); il sait de quoi il parle et à qui: des ignorants.

- le savoir est un contenu, l'élève un contenant.

- ce contenu s'apprend parce qu'il est transmis: l'enseignement, c'est la magistralité expositive, le discours du maître.

- le public est en position de "collectif frontal". Sa participation est sporadique.

- les mécanismes de compréhension étant les mêmes pour tous, la raison étant universelle, tous peuvent comprendre le même discours, à la même vitesse.

 

LES LIMITES DU MODELE

quelques postulats :

- la motivation par le contenu : ce que je vais leur dire est, en soi, intéressant donc ils vont écouter.

- la compréhension par la clarté : je sais être clair dans mes explications.

- la mémoire par la simplicité : j'ai simplifié au maximum pour qu'ils retiennent facilement.

- le savoir-faire par imitation : ils vont pouvoir le refaire puisque je le leur ai montré.

Mais cela marche rarement comme ça. Alors...

S'ils écoutaient, ils comprendraient mais ils sont démotivés, inattentifs et dispersés. S'ils faisaient un effort ils retiendraient mais ils n'ont pas la volonté...

Mais est-ce vraiment l'échec de l'élève ou plutôt l'échec du professeur qui, enfermé dans la seule logique d'enseignement, est incapable de comprendre le fonctionnement d'une logique d'apprentissage.


LOGIQUE D'APPRENTISSAGE

LE REFERENT:

Il est en rupture avec celui d'une logique d'enseignement car il déplace la problématique de l'enseignant vers l'élève.

La performance n'est plus centrée sur le maître mais sur l'apprenant car il s'agit d'apprentissage.

La relation privilégiée n'est plus celle du maître au savoir mais celle de l'apprenant à ce même savoir.

Il s'agit moins de transmettre un produit de pensée que de s'en approprier le processus.

Pourquoi cette nécessaire décentration ?

Pour éviter l'illusion d'optique : la logique de celui qui apprend c'est-à-dire la manière dont il fonctionne dans sa tête et son corps, n'est pas celle de celui qui expose. Celui-ci, parce qu'il sait, a l'amnésie de l'apprentissage de son savoir.

Tout est clair quand on a "compris" mais encore faut-il avoir compris. Et on ne peut facilement transférer la simplicité et la clarté du cerveau de celui qui sait dans celui qui apprend, pour lequel c'est souvent compliqué et confus parce qu'il est justement en train d'apprendre.

 

POURQUOI ET COMMENT ON APPREND ?

Il faut que comprendre et retenir aient un sens pour le sujet. La logique d'apprentissage implique une pédagogie du projet d'apprendre.

L'apprenant n'est pas une terre vierge: il a des représentations qui souvent font obstacle à l'apprentissage.

 L'apprenant n'est pas une cire molle que le savoir marquerait de son empreinte. Le cours magistral est efficace pour les bons élèves parce qu'ils repensent pour eux-même la pensée du maître, c'est-à-dire sont actifs dans l'écoute. L'apprentissage est une démarche d'appropriation, une auto-socio-construction des savoirs et savoir-faire.

Les représentations sont travaillées par le conflit socio-cognitif, en petits groupes avec les pairs puis en séance plénière. Le raisonnement inductif est privilégié ainsi que l'auto-évaluation avec des critères découverts par l'apprenant.

L'erreur n'est plus alors une faute. C'est une étape incontournable dans un apprentissage, c'est une information régulatrice d'un progrès à construire.

Enfin les individus ont leurs stratégies d'apprentissage, leurs habitudes cognitives à prendre en compte par la différenciation des méthodes.

L'enseignant ne délivre plus simplement un contenu, il médiatise le rapport des apprenants au savoir.

 

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